Je repond juste avec une longue citation plus ou moins éloignée du sujet ms qui m'avait aussi "fait sourire"
" La destruction des droits collectifs s’accompagne d’une politique de contrôle des savoirs que nous fabriquons. Du côté des journalistes, la précarisation se traduit d’abord par la détérioration des conditions de vie. Elle touche au premier chef les femmes et les jeunes. Dans un ouvrage collectif, "journalistes précaires", Alain Accardo, sociologue, et Gilles Balbastre, journaliste, montrent que la précarisation modifie les pratiques professionnelles. Les journalistes pigistes sont obligés de soumettre leur travail à une logique commerciale, qui détermine largement leur survie professionnelle.
La prolifération des magazines de presse grand public, des chaînes de télévision et de radio n’a pas accru le choix du consommateur ni celui du professionnel : la majorité de ces supports vendent un “ produit ” identique décliné sous des emballages différents. L’information est ravalée au rang de denrée à laquelle s’appliquent les mêmes règles que celles qui régissent les autres marchandises.
Dans ce système, le journaliste se donne l’illusion de la liberté alors qu’il fonctionne à partir de cases existantes. "Ça, c’est un peu intello, c’est un sujet pour Arte. Ce truc-là, c’est un peu plus racoleur, ça pourrait aller pour "Envoyé spécial" ou pour TF 1."
Cette manière de procéder conduit à éliminer d’office certains sujets jugés impossibles à "caser" par le pigiste lui-même ou par la rédaction. La réalité concernée par l’information risque alors d’être occultée. Combien d’enquêtes réalisées par des pigistes sur le monde du travail ? Combien d’articles écrits par des journalistes précaires sur la violence économique que vivent un grand nombre de salariés ?
Les réformes qui nous touchent sont du domaine du contrôle de nos fabriques, mais aussi de nos temporalités, de nos subjectivités, de nos choix de vies.
En même temps qu’elles opèrent une sélection des savoirs, ces réformes sélectionnent les individus qui ont accès à la formation, aux outils de production et de diffusion, à la possibilité d’exercer ces activités. Il ne s’agit pas tant de défendre un statut que de revendiquer la possibilité de fabriquer du sensible et du savoir selon nos propres temporalités, d’avoir le choix de nos modalités d’existence et de coopération, le choix de nos formes de vie.
Toutes les productions de l’esprit humain forment ce qu’on appelle le bien commun de l’humanité. Chercheurs sans statut, artistes au RMI, critiques à la pige, publics, étudiants, patients et profanes, nos mobilisations subjectives, intellectuelles et affectives tissent notre imaginaire social, nos savoirs sensibles. Le temps passé à chercher, à rêver, à bricoler, à ne rien faire, à parler, n’est pas l’apanage des artistes ou des chercheurs, il est simplement humain, il participe de notre intelligence collective. C‘est au nom de cette intelligence collective, de ce bien commun inaliénable, que nous posons la question de l’accès à la culture.
La question de la production et de la circulation des biens communs - la connaissance, la culture, l’information, la santé, l’enseignement - est une question “ publique ” par excellence.
Alors que les politiques de professionnalisation opposent producteurs et consommateurs, nous affirmons qu’entre le chercheur et le paysan, entre le malade et le médecin, entre le spectateur et l’intermittent comme entre l’étudiant et le professeur des chaînes de coopération et de coproduction sont possibles. Les malades du sida nous ont déjà montré comment les recherches et expertises autour du VIH ne pouvaient se passer ni de leurs savoirs ni de leurs collaborations.
Quelques chiffres, pour finir. Au cours de notre vie, nous passons 33 000 heures à l’école, 63 000 heures au travail et 96 000 devant la télé. Cela veut dire que toute l’espérance de vie que nous avons gagné depuis l’apparition de la télé, est passée devant le poste.
Est-il souhaitable que le temps de vie gagné grâce à la recherche médicale ou la réduction de temps de travail, soit passé devant TF1 ?"